Cher Yersinia pestis,
il me semble que votre discours a deux legers defauts: sa hauteur et sa provenance. Prevert disait qu'il ne faut pas laisser jouer les intellectuels avec des allumettes. Votre intervention semblant prouver qu'il avait parfaitement raison, vous me permettrez de preferer les poetes aux professeurs d'universite, surtout quand ils s'affublent de ce genre de pseudonymes dont j'espere qu'ils ne penseraient pas a y ajouter un qualificatif colore.
Percons donc, avec les precautions d'usage bien entendu, le bubon:
si vous aviez eu un peu de curiosite intellectuelle, vous auriez vu que le droit de greve en France a ete obtenu par une lutte constante ou il y eut des morts, et que ce droit est un droit constitutionnel.
Y eut-il des abus de l'usage de ce droit? Sans doute. Il y eut et il y a toujours d'ailleurs un abus de langage consecutif a mai 68: les "greves" etudiantes ou lyceennes sont des mises en scene parodiques qui n'impliquent jamais le poids et la profondeur d'une greve des personnes actives. Est-ce a partir de cette experience que vous voulez nous parler de la greve. En ce cas deja, votre discours manque singulierement de hauteur.
De meme, vous omettez de dire qu'il est une grande partie de la fonction publique dont le droit de greve n'existe pas ou est amenage. L'experience des dernieres annees tend a prouver d'ailleurs que ceux qui n'ont pas ce droit ou ethiquement cette possibilite (gendarmes, pompiers...) tendent a trouver des moyens d'expression de leurs mecontentements qui finissent par etre tout aussi genants pour le pouvoir, sinon(?) pour le public.
Mme Idrac, a la RATP, a mis en place une reforme qui, en obligeant aussi la hierachie a prendre en compte les objections des employes et de leurs organisations, a diminue de maniere drastique les jours de greve de cette entreprise publique.
Cette potion ne serait-elle pas applicable a d'autres secteurs de la fonction publique, plutot que d'agiter a nouveau le chiffon rouge?
Enfin, puis-je vous faire part de mon experience personnelle?
Les entreprises anglaises, suite au regne de Mme Thatcher, ne savent meme plus ce qu'est le terme greve. Est-ce un bien pour autant?
A en juger par les reactions de mes collegues dans des entreprises nouvelles et relativement hi-tech, puis-je vous faire part de ma surprise quand j'entendis plusieurs d'entre eux m'expliquer que leur attitude et la qualite de leur travail etait strictement fonction de la maniere dont ils estimaient que l'entreprise les maltraitait.
C'est a dire qu'ils en faisaient le moins possible (on ne peut meme plus parler ici de minimum syndical, avouez que c'est un comble).
Ne pas offrir de moyens de negociations et de moyens de pression aux salaries d'une entreprise, c'est aussi s'exposer a cette demotivation fondamentalement deletere, a cette greve individuelle larvee qui, a mon avis est bien pire pour la sante d'une entreprise qu'un conflit clair, porte sur la place publique.
Vous, professeur d'universite, et collectionneur de petites bacteries mortelles, auriez du savoir que les solutions radicales sont rarement les plsu efficaces, a long terme, quand on parle de l'Homme et de ses societes.
La peste soit des simplificatteurs de l'histoire!